Cláudia Cunha, Gil Vicente et les autres…
Au départ, il y a l’écoute, par le flâneur, d’un show de la chanteuse Cláudia Cunha sur la minuscule scène du petit théâtre Gamboa Nova, en 2009. Une double grâce, par la présence et la voix, crèva la scène ce soir-là. Puis un certain compagnonnage d’esprit avec l’un de ses paroliers, par d’autres biais citoyens, naquit. Sans oublier le fait que le disque de Cláudia Cunha fut lancé par le plus prestigieux label brésilien, Biscoito Fino, fait rarissime à Bahia, pour une artiste jeune.
« Salvador a une carence d’actions et d’espaces qui puissent absorber les talents de la ville. C’est absolument suffocant pour l’artiste local de survivre opprimé par le manque de fonds, de mécènes, de sponsors… Le gaspillage de talents provoque une migration dommageable à Salvador et je positive pour que des personnes comme Cláudia Cunha réussissent à trouver un espace digne le plus rapidement possible, que les pouvoirs publics et privés puissent potentialiser cette pléiade d’artistes qui font tant de bien à la ville amenant une alternative au marché brutal et souvent de mauvaise qualité qui occupe les radios, le carnaval, les espaces improvisés pour les présentations musicales ».
C’est à partir de ces propos – dans une conversation très récente avec Gil Vicente Tavares, pour évoquer la chanteuse Cláudia Cunha et le décor musical de Salvador en 2010 – qui m’ont semblé refléter une réalité, que la publication d’un entretien ciblé m’a semblé aller de soi, ici. Par le biais du courrier électronique, je lui ai demandé alors de recontextualiser son parcours et son partenariat – deux chansons – avec la chanteuse et la place de cette dernière dans le Salvador musical du début 2011.
BF : Comment fut le contexte de création de « Dança » et de « Mar do norte » ? Cela fut-il une demande de Cláudia Cunha, cela se révèla-t-il une pure création de ta part ?
G. V. T. :« Dança » a été composée comme une déclaration. J’étais en train de répéter un spectacle commémoratif dans lequel il y avait une danseuse, Bárbara Barbará [Donadel], qui m’avait déjà enchanté à la voir danser « Ulisses », spectacle de la troupe de danseurs de la Companhia Viladança. Impulsionné par la volonté de conquête et inspiré par l’artiste, j’ai fini par composer la chanson qui, quelque temps après, fut appréciée par Cláudia Cunha. Alors, nous avons appelé Jarbas Bittencourt pour faire les arrangements, car il avait accompagné, d’une certaine manière (note du traducteur: il travaille régulièrement avec les troupes diverses hébergées dans le Teatro Vila Velha, comme le Viladança), le processus de création de la musique. Nous avons fait l’enregistrement pour l’inscrire au Festival de Música da Educadorado FM en 2009, pour lequel nous avons été classés en cinquantième position par le jury. « Mar do norte » était une chanson instrumentale, avec le même titre, composée par Ivan Bastos. J’ai découvert la chanson lors d’un spectacle du Grupo Garagem au Microcentro Cultural dos Correios, une salle au Pelourinho. Tout de suite après le concert, j’ai été enthousiasmé par la mélodie et j’ai demandé à I. Bastos un enregistrement afin que je puisse écrire des paroles dessus. Ivan Huol, en même temps, s’est emballé pour l’idée et a déclaré que si j’écrivais les paroles, il l’enregistrait. Quelques temps après, j’ai fini par obtenir la musique dans le disque de feu le groupe Bonde Xadrez. Je l’ai tout de suite écoutée, écrit les paroles et téléphoné à Ivan. Nous l’avons inscrite dans le Festival de Musica de Educadora FM* de 2007 et nous avons entendu à la radio que Cláudia avait écouté la chanson. Elle avait déjà l’esprit occupé par son disque et a fini par inclure la chanson pour faire partie de son répertoire.
Depuis quand êtes-vous parolier ?
Ma première chanson fut un samba-enredo que j’ai fait, à l’école primaire, à Rio de Janeiro. J’ai toujours été un compositeur dilettante, amoureux que j’étais de la musique et stimulé par l’ambiance dans laquelle je vivais, entourés d’artistes, d’un père poète… Mais quand j’ai commencé à étudier la musique, un strict minimum de piano et ensuite la guitare, un monde musical s’est ouvert pour moi et, à 12, 13, 14 ans, j’ai commencé à me risquer à composer quelques chansons. J’ai toujours composé des chansons avec des paroles, jusqu‘à ce qu’à 17 ans, en pleine coupe du monde de football de 1994, je connaisse Luis Filipe de Lima. Il était chez moi, regardant la partie Brasil 1 et 0 USA et nous avons commencé à s’échanger des créations. À écouter mes chansons, il m’a donné trois mélodies pour que j’y mette des paroles. L’une d’entre elles a disparu, mais j’ai mis des paroles sur les deux autres, qui, jusqu’à aujourd’hui, sont chantées – l’une fait partie du répertoire récent de la chanteuse Stella Maris. De ce que je me souviens, et j’espère ne rien oublier d’important, cette filiation de parolier, proprement, comme une personne qui met des paroles sur une mélodie, a surgi des partenariats avec Luis Filipe de Lima.
Comment situes-tu Cláudia Cunha dans le décor de la chanson ? L’imagines-tu parolière, plus tard ?
Je trouve naturel notre partenariat, à partir du moment que nous sommes, comme artistes et amis, dans d’autres secteurs, partenaires constants. J’ai même reçu une chanson de sa part, mais qu’elle a ensuite écrite, heureusement, car j’aurais pu l’abîmer et elle a fini par l’enregistrer sur son disque, « No girar de Alice ». Je suis actuellement avec un samba non terminé, créé par elle et Ivan Bastos, si je ne me trompe, pour voir si cela va donner quelque chose, et je lui ai donné une chanson inachevée pour qu’elle la complète. Mais je la vois plus comme une créatrice de mélodies que de paroles. De toute manière, nous scellerons notre amitié artistique tôt ou tard avec un partenariat. J’adore faire des alliances. L’acte de créer, souvent, est très solitaire, et diviser cela avec une autre personne est divertissant, riche et stimulant.
Quelle serait la meilleure qualité de Claudia Cunha sur scène et pendant l’enregistrement d’un disque – qui sont deux choses bien différentes, à notre sens ?
Claudia est très exigente et critique, comme moi. Le problème est que son côté Oxum** prend le dessus, cette manière de jeune femme fragile couvre l’être ténébreux qu’elle garde en elle. Et c’est justement cette matrice qui fait qu’elle a cette perception aigüe du « faire » artistique. Elle est une des personnes avec laquelle j’aime le plus converser sur les arts, actuellement, justement car nous avons une syntonie dans l’analyse des œuvres qui nous met du même côté du « ring ». Je me souviens de nombreux moments où, stimulé par Cláudia, j’ai proposé de nombreux commentaires sur son show, et – l’écrasante majorité des fois – elle était d’accord avec moi ; une symbiose salutaire. Elle n’a pas l’aigreur soteropolitana de l’hypocrisie et de juger la critique comme une offense. Ainsi, je crois que Cláudia se met en évidence comme une artiste, au-delà de sa technique et de son timbre vocal, qui dialogue et analyse sa propre création, amenant une sécurité et une précision dans son « faire » musical, qui se perçoit dans le raffinement et l’attention portés à ses productions phonographiques et sur scène.
Comme elle n’a lancé qu’un seul disque, et que j’ai déjà vu plusieurs de ses shows, il est difficile d’établir une facile comparaison. Je pense qu’après un troisième disque, nous pourrons mieux évaluer sa carrière phonographique, avec un distancement historique et des œuvres pour comparer.
* Educadora FM est une radio publique de Bahia, dépendant de l’IRDEB. Seul « Mar do norte » figure dans le disque. « Dança », enregistrée, ne figure sur aucun support, en janvier 2011.
** Oxum, la divinité afro-brésilienne de l’eau douce.
http://www.myspace.com/claudiacunha
Mar do norte (Ivan Bastos et Gil Vicente Tavares)
Seul celui qui ne connaît la mer
Peut penser qu’une onde, par vent fort, puisse ramener
Les souvenirs que j’ai laissé
Et noyé dans une mer du nord
En moi la mer est dessalée
Sans soleil, sans calme plat, je suis navigateur
Qui perd son vaisseau, le gouvernail au sud
M’a donné l’envie de me perdre en cette douleur bleue
Au-delà de moi reste le rêveur
Qui sait guider la douleur bleue
Je suis en deçà du sud
Mais je ne sais plus me trouver ici au sud
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Só quem não conhece o mar
Pode pensar que a onda traz num vento forte
As lembranças que eu deixei
E afoguei num mar do norte
Mar em mim ficou sem sal
Sem sol sem calmaria, sou navegador
Que perde a nau, o leme ao sul
De em mim perder-me nesta dor de cor azul
Além de mim ficou o sonhador
Que sabe navegar a dor azul
Aquém do norte estou
Mas não sei mais me achar aqui no sul.
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– Como foi o contexto de criacao de « dança » e de « mar do norte ». Teve pedido da Cláudia, foi criação pura de você?
– « Dança » foi composta como uma declaração. Eu estava ensaiando um espetáculo comemorativo no qual havia uma bailarina, Bárbara Barbará, pela qual eu já havia me encantado ao vê-la dançando « Ulisses », espetáculo do Viladança. Impulsionado pela vontade da conquista e inspirado pela artista, acabei compondo a canção que, tempos depois, Cláudia Cunha acabou por gostar. Daí, chamamos Jarbas Bittencourt pra fazer os arranjos, ele, que havia acompanhado, de certa forma, o processo de criação da música. Fizemos a gravação para inscrevê-la no Festival de Música da Educadora FM de 2009, no qual ficamos em quinquagésimo lugar na escolha dos jurados.
« Mar do norte » era uma canção instrumental, de mesmo título, composta por Ivan Bastos. Conheci a canção numa apresentação do Grupo garagem no Microcentro Cultural dos Correios, uma sala no Pelourinho. Logo depois do concerto, fiquei entusiasmado com a melodia e pedi pra Ivan Bastos alguma gravação pra eu que pudesse botar letra. Ivan Huol, na mesma hora, se entusiasmou e disse que se eu botasse letra ele gravava. Tempos e enrolações depois, acabei por conseguir a música num CD da extinta banda Bonde Xadrez. Na mesma hora ouvi, botei a letra e liguei pra Ivan. Botamos no Festival de Música da Educadora FM de 2007 e foi ouvindo na rádio que Cláudia Cunha tomou conhecimento da canção. Ela já estava em processo de pensar seu CD e acabou selecionando a canção pra fazer parte de seu repertório.
– Desde quando você é letrista?
– Minha primeira canção foi um samba-enredo que fiz no primário do meu colégio, no Rio de Janeiro. Sempre fui um compositor diletante, apaixonado que era por música e estimulado às letras pelo ambiente em que eu vivia, rodeado de artistas, de um pai poeta. Mas quando comecei a estudar música, um mínimo ridículo de piano e depois violão, um mundo musical foi se abrindo pra mim e aos 13, 14 anos comecei a arriscar umas canções. Sempre compus canções com letra, até o dia em que, aos 17 anos, em plena copa de 1994, conheci Luís Filipe de Lima. Ele estava lá em casa, vendo o jogo Brasil 1 x 0 EUA, e começamos a trocar figurinhas. Ele, ao ouvir minhas canções, resolveu deixar três melodias pra eu botar letra. Uma delas sumiu, mas coloquei letra nas outras duas que, até hoje, são cantadas – uma delas fez parte de um repertório recente da cantora Stella Maris. Que eu me lembre, e espero não estar esquecendo algum fato importante, essa função de letrista, propriamente, como a pessoa que põe letra numa melodia, surgiu das parcerias com Luís Filipe de Lima.
– Como você situa a Cláudia no cenário atual? Você veja ela como letrista, mais tarde, também, ou não?
– Acho que será natural nossa parceria, já que como amigos e artistas, em outros âmbitos, já somos parceiros constantes. Cheguei a receber uma canção dela, mas que a própria depois botou letra graças a deus, pois eu poderia ter estragado a canção que ela acabou gravando em seu CD, também; « No girar de Alice ». Estou com um samba inacabado, criado por ela e Ivan Bastos, se não me engano, pra ver se sai coisa, e entreguei uma canção inacabada pra ela completar. Mas a vejo mais como criadora de melodias do que de letras. De qualquer modo, ainda selaremos nossa amizade artística mais cedo ou mais tarde com uma parceria. Adoro fazer parcerias. O ato de criar, por vezes, é muito solitário, e dividir isso com outra pessoa é divertido, rico e estimulante.
– Qual seria a maior qualidade dela no palco e no canto e nas gravações de um disco – que são duas coisas bem diferentes, a meu ver?
– Cláudia é muito chata e crítica, como eu. O problema é que a Oxum dela toma a frente, aquele jeito de menina frágil acoberta o monstro tenebroso que ela guarda dentro de si. E é justamente esse monstro que faz com que ela tenha essa percepção aguçada do fazer artístico. Ela é uma das pessoas que mais me interessa conversar sobre arte, hoje em dia, justamente porque temos uma sintonia da avaliação das obras que nos coloca do mesmo lado do ringue. Lembro de vários momentos onde, estimulado por ela, teci comentários sobre seu xou, e ela – na maioria absoluta das vezes – entrava em concordância comigo; uma sintonia saudável e boa. Ela não tem aquele ranço soteropolitano da hipocrisia e do ver a crítica como uma ofensa. Por tudo isso, penso que Cláudia se encontre num lugar de destaque como artista que, para além de sua técnica e timbre vocal, é um lugar de artista que dialoga e analisa sua própria criação, trazendo uma segurança e precisão ao fazer musical que se percebe no esmero e cuidado de suas produções fonográficas e de palco.
Como ela lançou apenas um disco, e já vi vários xous dela, fica difícil uma comparação clara. Acho que depois de um terceiro disco se possa ter uma avaliação mais segura de sua carreira fonográfica, com um distanciamento histórico e material comparativo.
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