Almandrade : « une reconnaissance de mon seul travail »

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"Homenagem à Arquitetura Moderna"

« A arquitetura brasileira da atualidade, na sua melhor intenção, não chega a ser medíocre, é mediana. »
Décio Pignatari

Le mardi 21 août 2012 au soir, un artiste bahianais, rare, était au centre de toutes les attentions artistiques d’un des publics les plus exigeants du Brésil. « Homenagem à Arquitetura Moderna«  trônait en effet au centre d’un lieu magnifique, le Museu do Rio Grande do Sul (MARGS), sis à Porto Alegre, à l’extrême sud du Brésil. Almandrade pouvait jubiler, le directeur Gaudêncio Feliz venait de le présenter aux centaines d’invités comme « l’un des artistes bahianais les plus respectés dans le monde de l’art contemporain ». Revenu à Salvador – ville dont l’ensemble des médias ont scandaleusement ignoré cette reconnaissance artistique extraordinaire – s’est confié aux rédacteurs de ce blog celui qui, depuis quarante ans, loin du « marché de l’art », est au plus près, dans ses créations – comme moins d’une petite poignée au Brésil – des idées révolutionnaires qui ont guidé les fondateurs, dont il fut l’ami, du Concrétisme.

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"Homenagem à Arquitetura Moderna"

– Almandrade, peux-tu remonter à la genèse de cette œuvre ?
C’était en 1979, j’étais fraîchement diplômé d’architecture par l’université fédérale de Bahia. J’étais à ma table de travail et je voulais à toute force, absolument, questionner le nom même d’architecture. Il s’agissait pour moi de penser d’abord plus dans le regard que dans la pénétration de l’œuvre (« mais no olhar que no penetrar na obra »).
– Comment s’est effectuée l’invitation du musée de Porto Alegre ?
C’est le commissaire de l’exposition – José Francisco Alves – qui m’a appelé, début juin. J’avais publié précédemment (1) un article qu’il avait proposé à ses élèves dans l’un de ses ateliers d’enseignement de l’art, organisé par la mairie de Porto Alegre. Il avait aimé mon point de vue et avait en charge, de plus, le commissariat d’une exposition à inaugurer  le 20 août 2012, et voyait la possibilité d’y insérer un de mes travaux.
– Du texte à l’oeuvre, comment as-tu donc passé le pont ?
J’ai envoyé à José Francisco Alves par courrier éléctronique des projets, des dessins pour des installations, des sculptures, récentes et plus anciennes. Et il a adoré les dessins et les fotos de la maquette de l’un d’entre eux, intitulé « Homenagem à arquitetura na era moderna ». Je l’avais conçu, dans les conditions déjà évoquées, et construit alors, en carton. Il mesurait 30 cm de haut.
– Cette pièce, quel en est l’axe créatif ?
C’est une forme pour questionner l’architecture, profondément. Une maison sans mur, avec des piliers et une dalle comme premier étage. Et un escalier qui monte et descend et ne mène nulle part (« uma escada que sobe e desce e chega em nenhum lugar »).
– Pour quel lieu fut-elle pensée ?
Elle était destinée à un espace public, un parc. Elle est en partie ludique, pensée pour être en béton armé. L’original était peint en blanc et avait d’autre part la couleur grise du béton.
– En Porto Alegre, dans l’espace du Musée, comment s’intègre-t-elle ?
Elle a une liaison jumelle à l’édifice historique, plein d’arcs, elle s’y fond. Il me semble que cette pièce fut pensée pour ce lieu.
– Comment s’est effectuée le montage de l’œuvre ?
L’équipe technique du musée l’a montée en deux semaines. Depuis Salvador, je recevais par internet les photos au fur et à mesure de la construction. J’ai bien sûr évalué la résistance du bois utilisé –
mdf, fibre de bois et résines synthétiques – et donné mon autorisation. Elle peut être montée et remontée à l’infini, le très vigilant commissaire José Francisco Alves y a veillé. Elle mesure 2,80 mètres de haut.
– Quelle en est le statut officiel, dans le fonds du musée ?
J’ai effectué une donation et j’ai signé un document validant cet acte. Une « association des amis du musée » a assuré le financement.
– Quel est ton sentiment général, depuis ton retour de Porto Alegre ?
C’est une immense joie. Il y a une reconnaissance de mon travail seulement à travers le travail lui-même. Mon travail renvoie à de nombreuses interrogations sur la question même de la fin de l’architecture en tant qu’art, pour entrer dans l’ère de l’entreprise (emprenditemento) immobilière, malheureusement. À chaque moment, depuis quarante ans, les préceptes de Décio Pignatari et d’Hélio Oiticica m’accompagnent.

(Entretien réalisé en début de soirée du vendredi 31 août 2012, dans les jardins, déserts, du Goethe Institute de Salvador)

Almandrade a publié récemment deux articles fondamentaux:
(1) en mai 2012, dans le blog www.portalartes.com.br, l’article « O museu e a arte contaporânea ».
(2) fin août 2012, dans le prestigieux blog
www.culturaemercado « Um museu à deriva e uma cidade sem olhar » (Un musée à la dérive et une ville sans regard »), à propos de l’actualité du musée de Salvador  – Palacete das Artes / Museu Rodin – qui a reçu des copies des œuvres de Auguste Rodin… Nous en proposerons une traduction demain 5 septembre 2012.

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1 réponse

  1. Paulo Borba Costa dit :

    O que mais surpreende em ALMANDRADE, o « Tui » do seu tio Joãozinho, tão precocemente subtraído da vida, é a sua humildade e modéstia, apesar do seu vasto conhecimento e invulgar cultura artística.
    Os paulistas de alto costado, pessoal da maior vanguarda artística reconhece nele um artista especial e insuperável. Orgulho para nós sanfelipenses!

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